Il y a des hommes qui aiment à rester à un endroit bien précis, à ne jamais quitter leur chez soi, leur repaire. Comme s'ils se trouvaient être en sécurité dans ses lieux précis, et non pas ailleurs. Néanmoins, il existe d'autre personnage, capable de voyager au travers du monde, à la recherche d'une quête personnelle, ou d'une simple envie d'évasion. La jeune femme au teint laiteux qui avance doucement fait partie de cette seconde catégorie, ayant quitté son logis pour partir en direction d'un tout autre pays, comme elle l'avait décidé.
Cela faisait un an et demi qu'elle arpentait les contrées du Yuukan, vaguant ci et là avant de se poser, ce n'était nullement une contrainte, mais plutôt un choix. Elle aurait pu rejoindre le village de Dokusai au plus vite possible, mais non, la Rose avait préféré se rendre dans d'autre endroits, visiter, rencontrer, apprendre même. Mais son aventure devait toucher à sa fin, les dangers étaient multiples par ici, et même si sa méfiance et sa concentration s'étaient accru avec le temps, être une nomade n'amenait à rien. C'était là son avis, à quoi beau avoir tout vue de ce monde, si ce n'est pour le revisiter encore et encore ? Nul intérêt en somme.

Alors, la petite jeune fille se rapprochait doucement mais sûrement de son « lieux saint », c'était sans doute une folie que de vouloir y aller, mais qui ne nous dit pas que elle qui avait servi de cobaye en avait été on ne peut plus affecter mentalement ? Son masochisme est une réponse en soi. Il ne faut nullement chercher plus loin que ce que l'on a devant nous. Et si toutefois l'on ne la connaît pas suffisamment pour en juger, les quelques dessins sur ses bras en témoignent largement, d'autant plus que ses lobes, la lumière passant au travers de ceux-ci.
Coupant court à son avancée qui durait depuis déjà plusieurs heures, elle s'assit sur un rocher, juste sous les rayons du soleil qui se reflétait sur sa peau de marbre. Soupirant un instant, Makkura décida de s'octroyer sa pause habituelle, cependant qu'elle saisit du bout de ses griffes qui lui servaient d'ongles un petit tube blanc. Une cigarette, qu'elle alluma d'un geste habitué, recrachant ensuite la fumée calmement. Ce matin-là, le temps était calme, un petit astre diurne discret perçait les nuages, et quelques oiseaux chantaient déjà. Mais ce bonheur tranquille avait le don d'hérisser l'échine de l'Empoisonneuse, claquant sa langue dans une petite mimique déconfite.

Soudain, comme un félin en repos, la Rose se redressa brusquement, alerté par un léger bruit. Elle fronçait alors les sourcils, promenant son regard inexpressifs dans les fourrés afin de repérer d'où venait la sonorité. Finissant par plisser les paupières, avant de ré-ouvrir les yeux sur le détails qui les avait attirés. Au fond de l'ombre des arbres se mouvait une personne à la chevelure au couleur des blés, luisant légèrement au soleil comme la peau de Makkura, elle se levait doucement, saisissant un de ses senbons dans sa pochette arrière. Puis se mettant légèrement en garde, la Rose avançait à pas de loups.
Sa méfiance et son instinct de survie qui s'étaient développés lui permettait d'ors et déjà à se protégé des attaques extérieurs, et même si la personne qui avançait vers elle n'était pas d'humeur offensif, elle préférait se protégé.

Toujours en position de défense, tapie telle un fauve, la Rose ne lâchait toujours pas ses armes. Et ce, à mesure que les pas se rapprochait, elle sentait même sa peau s'entailler sous l'impulsion des senbons qu'elle serrait fortement dans sa main. Le sang avait même commencer à couler, mais cela ne l'importait que peu. Enfin, celui qui s'approchait de l'Empoisonneuse ne tardait pas à se montrer à découvert.
C'est la surprise et le soulagement qui prenaient alors le dessus, une enfant. Voilà ce qui venait de se montrer. Une petite fille tenant un bouquet de fleur entre ses petites mains et qui appelait gaiement sa mère. Le regard de Makkura se ravisait alors, peut-être que justement, le parent pourrait être en revanche une menace. Soudain, dans sa naïveté enfantine, la gamine aux cheveux violets interpellait la femme aux tatouages, l'interrogeant justement sur ceux-ci. Cependant que la Rose s'apprêtait à répondre, une femme aux cheveux à la couleur des blés arrivait, la fixant d'un air préventif, comme si elle lui intimait le choix entre risquer sa vie en attaquant la gamine, ou à l'inverse, faire part d'une patience et d'un calme nécessaire.

- Ils sont... ma vie, mon histoire et mes souvenirs à la fois..., tout en narrant cela, elle portait ses yeux de pierre sur les fameux dessins. Ils sont tristes, c'est vrai … Ma vie l'est aussi à vrai dire, c'est un reflet, comme un miroir des mémoires. Certaines personnes s'inscrivent des choses heureuses uniquement, je préfère tout mettre, c'est peut-être étrange, tu comprendras un jour.

Et comme un soleil au plein milieu de la nuit, un sourire arrivait sur son visage. Il n'était peut-être pas vrai, mais face à une enfant qui à la joie de vivre dans un bonheur dès son plus jeune âge, elle ne pouvait être violente. Et le regard pesant de la mère ne pouvait qu'influencer ce choix à vrai dire. Bien que masochiste, elle n'était cependant pas désespérée pour autant.

- De quel village venez-vous ? Cette fois, la fille aux cheveux roses s'adressait à la femme. Je veux atteindre Dokusai...

La fatigue qui l'habitait désormais se reportait sur son visage, et des cernes violettes avaient marqués ses joues. Son vagabondage durait alors depuis bien trop longtemps pour permettre à la Rose de récupérer ses forces comme il se doit. Et ne dormir que sur une oreille n'était pas reposant non plus.
Makkura sortit une cigarette, tenant à s'éloigner de l'enfant pour ne pas l'enfumer. Un réflexe humain, ce qui l'étonnait justement. Elle qui, habituellement, se fichait de la mort d'autrui comme de sa première expérience, celle qui prenait un plaisir à faire durer une torture, voilà qu'elle prenait la peine d'éviter le mal.